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Ma tres chere grande soeur

Ji-young Gong

Philippe Picquier

  • Conseillé par (Les Lisières à Villeneuve d'Ascq)
    11 juin 2018

    Séoul, 1960's.

    Dans un récit d’une fulgurante honnêteté, Ji-Young Gong raconte sa relations avec Bongsun, sa « très chère grande sœur ». Un texte vrai, qui n’enjolive rien de la vie quotidienne dans la Corée des années 1960. Émouvant !

    Bongsun est une petite fille de 7 ans, lorsqu’elle rencontre pour la première fois la famille de Ji-young Gong. Orpheline, elle avait été recueillie par une famille aisée, propriétaire d’une maison dont la famille de l’écrivaine était locataire. Maltraitée, battue et sous-alimentée, la fillette faisait peine à voir. Deux ans plus tard, alors que la famille est sur le point de déménager, la mère de Jjang-a (surnom de l’autrice dans sa jeunesse) décide de recueillir Bongsun. Dès lors, elle fait presque partie de la famille. Presque car son statut est à mi-chemin entre celui d’une fille adoptive et celui d’une bonne. Chargée de veillée sur Jjang-a, la petite dernière, alors âgée de 4 ans, Bongsun doit aussi préparer les repas, faire le ménage et elle n’a pas été inscrite à l’école. Cette situation ambiguë n’empêche pas Jjang-a de s’attacher à celle qui lui sert à la fois de mère et de grande sœur ! Trop jeune pour suivre son frère et sa sœur à l’école, Jjang-a est toujours accrochée à Bongsun, véritable rayon de soleil, dont le large sourire vient réchauffer le cœur parfois chagriné de la petite fille… Mais lorsque Bongsun, adolescente, tombe sous le charme d’un employé de la teinturerie, Jjang-a se trouve de plus en plus souvent livrée à elle-même. Expérimentant très jeune de nombreux interdits, elle est profondément bouleversée lorsque Bongsun fugue aux côtés de son amoureux…
    Ce récit sincère ne cache rien de la réalité d’une situation familiale complexe, ne cherche pas à dresser un tableau plus flatteur ou plus beau de la vie dans le Séoul des années 1960 : pauvreté, exclusion, lutte des classes, sexisme… Écrivaine extrêmement engagée, Ji-young Gong est très populaire en Corée. Respectée pour son combat contre la dictature, elle livre ici un récit intime bouleversant !


  • Conseillé par
    27 août 2019

    Tel un chat qui quitte des maîtres négligents pour se trouver un nouveau toit, Bogsun, maltraitée et affamée par sa famille d'accueil, a choisi la famille de Jjiang-a pour fuir ses bourreaux. Chez Jjiang-a on est pauvre mais généreux. Le père poursuit ses études aux États-Unis, la mère travaille au marché, la famille vit en location dans un sombre sous-sol mais Bogsun y reçoit chaque jour sa part de riz.
    Elle avait 12 ans à la naissance de Jjiang-a et c'est tout naturellement qu'elle a pris la petite en charge, la promenant sur son dos, la nourrissant et l'endormant au son de ses histoires. Jjiang-a grandi avec cette sœur qu'elle suit partout, partageant son lit, ses secrets et ses escapades nocturnes. Pourtant, avec le retour au pays du père, la situation change. Á mesure que la famille prospère, déménage dans un meilleur quartier, devient propriétaire, Jjiang-a prend conscience que Bogsun n'est pas vraiment sa sœur, plutôt une domestique que l'on tolère par pure bonté, pour finir par devenir une charge indésirable...

    Quelque quarante ans plus tard, Jjiang-a, auteure reconnue, engagée contre la dictature, raconte sa ''très chère grande sœur'' dont le sourire et l'optimisme ont illuminé son enfance. Et pourtant, comme le reste de la famille, elle s'en est détachée, allant jusqu'à l'effacer de sa mémoire. Compagne de misère, Bogsun en est aussi le témoin gênant et ne saurait les suivre dans leur ascension sociale. C'est aussi ce que décrit Jjiang-a : la Corée du Sud des années 60, la pauvreté extrême, la solidarité, l'ambition de s'en sortir et la perte des valeurs de ceux qui s'enrichissent.
    Une écriture simple pour dire l'insouciance et l'amour inconditionnel de l'enfant, mais aussi le rejet, la honte et la culpabilité de l'adulte. Beaucoup de profondeur et de sentiments pour cette auteur qui sait toujours toucher au cœur. Même s'il n'a pas la puissance de "Nos jours heureux", "Ma très chère grande sœur" est un beau roman au ton doux-amer. Bogsun, durement marquée par la vie mais toujours solaire et souriante restera longtemps dans l'esprit du lecteur.