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Yéti

Taï-Marc Le Thanh

Gautier-Languereau

  • Conseillé par (Librairie Récréalivres)
    28 février 2016

    La voyageuse contemplant la mer de nuages

    Sur la couverture de cet album au très grand format, une immense créature au pelage blanc assure la possible chute d’une alpiniste en posture précaire. Un yéti comme le titre l’indique sous son vernis sélectif rouge. Mais un « yéti » sans majuscule et sans déterminant : ni le nom commun, ni le nom (propre), plutôt l’archétype, le symbole (apparaîtra plus tard un chien qui lui aussi sera nommé simplement « chien »).

    « yéti » est le récit à la première personne d’une femme obsédée par la véracité de l’existence du yéti. Le lecteur la suivra dans la réalisation d’un voyage jusqu’au sommet d’une montagne où elle sera supposée enfin le rencontrer.

    « yéti » n’est pas un album illustré proprement dit car à part sur la première illustration en forme de portrait, Rebecca Dautremer choisit d’interpréter l’obsession de l’héroïne. Le yéti ou son ombre sont en effet présents dans toutes les images bien qu’aucun personnage ne s’en aperçoive, validant la vision de la créature fantastique comme issue d’un monde parallèle ou de la psyché de la narratrice.

    Rebecca Dautremer compose ses images à la façon d’un chef opérateur inspiré, privilégiant les plans d’ensemble, soignant les perspectives avec un sens de l’équilibre et une minutie qui pourraient sembler purement virtuoses si l’usage des couleurs ne venait animer le tout : couleurs chaudes, contrastes audacieux, rouges magnifiques, verts profonds. Palette d’abord en adéquation parfaite avec l’époque et le cadre géographiques choisis et pourtant jamais définis dans le texte de Taï-Marc Le Thanh (l’Amérique centrale des années 50) puis glissant progressivement vers le dénuement (une vision très allemande de la Cordillère des Andes).

    L’illustratrice suggère par ailleurs une autre piste d’interprétation autour de l’image représentant l’héroïne, allongée dans son lit, concentrée sur sa lecture. Ce voyage serait-il fantasmé au même titre que le yéti ?

    L’album semble vouloir résoudre cette incertitude dans ses dernières pages qui anticipent ou présagent le premier face à face. Le regard du personnage principal (qui apparaît ici comme le prolongement du célèbre tableau de Caspard David Friedrich) dans la dernière double page est peut-être effectivement celui de la rencontre souhaitée. Mais ce « regard caméra » semble comme perdu dans le vague, emprunt de mélancolie et d’indétermination. Qui ou que regarde-t-elle ? Le yéti ? Le paysage ? Le lecteur ?

    « yéti » est un voyage initiatique à la recherche d’une vérité cachée, peut-être un prétexte pour enfin se rencontrer soi-même, entièrement. C’est aussi, on l’imagine, l’autoportrait d’une artiste romantique (au sens classique) qui forte d’une maîtrise toujours impressionnante, fait néanmoins l’expérience du doute et de la solitude dans le cadre grandiose d’une nature sauvage, presque abstraite.


  • Conseillé par (Vauban)
    10 décembre 2015

    Yeti

    Ce qu'on désire plus que tout au monde est parfois juste derrière soi, sans qu'on le sache... il suffit de se retourner.
    Magnifique!