Du Soleil à la Terre

"Il faut que tout cela cesse." "Monsieur le ministre des Finances, que signifie ce tumulte ?" A deux cents ans de distance, deux phrases se répondent, comme en écho, dans la bouche du plus haut personnage de l'Etat. Elles impliquent à chaque fois Saint-Gobain. C'est Louis XV qui prononce la première en 1758. La seconde tombe d'un jugement gaullien au beau milieu d'un charivari médiatique provoqué par la bataille boursière de fameuse mémoire entre BSN et la compagnie tricentenaire. Longtemps la seule entreprise française citée dans les manuels scolaires, Saint-Gobain fait partie de notre paysage historique. Fondée en 1665 par Colbert, elle est l'unique survivante des manufactures privées d'alors. Entreprise plus que tricentenaire, elle offre le paradoxe d'être devenue l'un des groupes internationaux les plus jeunes après sa fusion avec Pont-à-Mousson en 1970. Illustrant les ambiguïtés de la tentation étatiste en matière économique, elle se trouve en 1982 et en 1986 au coeur du débat entre nationalisateurs et dénationalisateurs. L'histoire de cette multinationale "à la française" aurait pu n'être qu'une saga lénifiante sur les "merveilles de l'industrie". Mais c'est bien d'un autre livre qu'il s'agit, celui d'un parcours de plus de trois siècles au coeur des sociétés et des temps successifs, actualisé jusqu'à l'époque la plus immédiate, avec ses acteurs de chair et de sang. Maintenant que sont devenues plus familières au grand public les notions d'identité et de culture de l'entreprise, il comprendra, au fil du récit historique, pourquoi Saint-Gobain a fini par incarner une forme de patrimoine industriel dynamique et irremplaçable, comment au gré d'évolutions totalement différentes ont fini par se rencontrer, "Du Soleil à la Terre", les glaces de Versailles, les vitres des carrosses du Roi Soleil et les tuyaux de Pont-à-Mousson, pour se transformer ensemble et aborder sur des bases nouvelles le XXIe siècle.